Un marché mondial dominé par le continent américain
En forte progression depuis une vingtaine d'années, les ventes de semences à l'échelle de la planète ont marqué le pas l'an dernier, en conventionnelles comme en OGM.
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Les Etats-Unis sont aujourd'hui le premier utilisateur de semences dans le monde, avec un marché estimé en valeur, à 12 Mds$. Si on y ajoute les ventes de semences au Brésil, 2,6 Mds$, au Canada, 2,1 Mds$, en Argentine, près de 1 Md$, et au Mexique, le continent américain caracole largement en tête du marché des semences, à l'échelle de la planète, avec des ventes annuelles de plus de 18 Mds$ pour ces cinq pays. Ces données sont issues de la compilation d'informations recueillies par l'International Seed Federation auprès de ses membres pour 2013. Même si l'ISF a décidé de ne plus publier de chiffres sur les marchés intérieurs des semences en 2014, car elle juge l'exercice trop imprécis, ces données donnent quand même une idée de la taille du marché dans les principaux pays ou groupes de pays. Le deuxième grand marché pour les semences, toutes espèces confondues, est la Chine, avec une valeur en 2013, estimée à près de 10 Mds$. Si on additionne à la Chine, les marchés intérieurs de l'Inde, 2 Mds$, du Japon, 1,35 Md$, de la Corée du Sud et de Taïwan, on obtient une valeur totale de 14 Mds$.
L'Europe, un cinquième du marché mondial
L'Europe, malgré des surfaces cultivées beaucoup plus modestes, arrive juste derrière, avec un marché estimé par l'ISF en 2013, autour de 7,625 Mds$. Sur un marché mondial estimé à 45 Mds$, les Etats-Unis représentent à eux seuls, 27 % des ventes de semences, la Chine, 22 %, et l'Europe, 20 %. « Aujourd'hui, nous estimons le marché européen entre 7 et 7,5 Mds€ », précise Garlich von Essen, secrétaire général de l'Esa, European seed Association. En Europe, la France arrive en toute première position avec, en 2013, une valeur pour le marché intérieur de 2,154 Mds€. L'ISF la plaçait même en 3e position sur le marché mondial, seule, avec 2,8 Mds$ de marché intérieur en 2013, devant le Brésil. Le deuxième marché européen est sans surprise l'Allemagne, devant l'Italie et l'Espagne, puis les Pays-Bas, qui malgré des surfaces cultivées limitées, utilisent des semences à valeur élevée, notamment en potagères et florales. Viennent ensuite, le Royaume-Uni, la République Tchèque, la Hongrie et la Pologne. La France représente à elle seule, 37 % du marché européen des semences, et le marché intérieur des trois principaux pays européen, 56 % du marché total de l'Union européenne. « La grande interrogation en matière de statistiques est le développement récent de l'Afrique, souligne François-Xavier Masson, chargé d'affaires, chez Unigrains (1) qui suit attentivement les évolutions du marché des semences. En dehors de l'Afrique du Sud, nous disposons de très peu de données, pourtant une entreprise comme Seed Co, dont Limagrain a acquis une partie du capital, réalise un chiffre d'affaires de plus de 100 M$. » Seed Co est basé au Zimbabwe mais est présent dans une quinzaine de pays.
La semence est aussi un produit qui s'exporte. Et sur ce point, la France est aussi très bien placée. « Elle est aujourd'hui, non seulement le premier pays européen producteur de semences, mais elle est aussi le premier exportateur mondial de semences, note François Burgaud du Gnis, même si 70 % de ses ventes à l'export sont destinées aux autres pays membres de l'Union européenne. » Elle est suivie de près par un autre pays européen, les Pays-Bas, devant les Etats-Unis et l'Allemagne. Au début des années 1990, les différents observateurs estimaient le marché mondial des semences commerciales à environ 15 Mds$, et celles des semences achetées et distribuées par les Etats, également autour de 15 Mds$, ce qui donnait un marché total d'environ 30 Mds$. Depuis, les ventes de semences à l'échelle de la planète ont connu une croissance régulière pour atteindre entre 42 et 45 Mds$, ces dernières années, selon la parité des monnaies par rapport au dollar.
Un coup d'arrêt en 2015
Entre-temps, la part des semences OGM a fait un bond considérable, puisque les surfaces cultivées avec des OGM sont passées selon l'Isaaa, de 1,7 Mha en 1996, à 179,7 Mha en 2015. « En 2015, le marché s'est stabilisé et a même légèrement reculé, note François-Xavier Masson. C'est vrai en semences conventionnelles, mais aussi et pour la première fois, en semences OGM. La principale raison est l'affaiblissement du cours des matières premières qui n'a pas poussé les agriculteurs à investir dans les intrants. On en a eu un impact direct en France avec la baisse des exportations de semences de maïs. » Après un pic en 2014, à 181,5 Mha, les surfaces implantées avec des OGM sont repassées sous la barre des 180 Mha en 2015. L'Isaaa qui s'appuie sur une étude du cabinet Cropnosis, estime que sur un marché mondial des semences de 45 Mds$, la part des OGM s'élève à 15,7 Mds$, soit environ 34 %. Avec ce recul des surfaces à l'échelle de la planète, aurait-on atteint un palier en matière d'OGM ? « Si le cours des matières premières repart à la hausse, celui des semences devrait retrouver sa croissance, estime François-Xavier Masson. Ce ne sera peut-être pas forcément le cas de celui des OGM. Quand on sait que 92 à 95 % des surfaces de maïs, soja et coton aux Etats-Unis sont déjà OGM, la marge de progrès sur ce marché est désormais limitée. Pour que les surfaces d'OGM progressent, il faudra peut-être que les semenciers apportent de nouvelles réponses aux agriculteurs de la planète, en matière de résistance à la sécheresse, et d'efficience de l'azote... par exemple, ce sur quoi ils travaillent d'ailleurs. »
Quant à l'évolution du marché des semences conventionnelles « la Russie et l'Ukraine ont offert aux entreprises européennes un grand appel d'air dans les années 2010 à 2015, mais ce potentiel de développement atteint aujourd'hui un palier, reconnaît François-Xavier Masson. L'Afrique va bien sûr progresser, mais aussi l'Amérique du Sud ».
Des zones en croissance
Garlich von Essen estime aussi que le marché mondial des semences va continuer à croître. « Les deux grands marchés qui permettent de bien valoriser les semences sont les continents européens et américains, explique le secrétaire général de l'Esa. La Turquie peut aussi constituer un grand marché. L'Asie et l'Afrique sont les deux grandes zones en développement qui vont constituer dans l'avenir des marchés potentiels très importants. Ce sont cependant des pays où il est plus difficile de travailler pour des questions de réglementation. » Mais ce qui n'était pas possible hier, le devient progressivement aujourd'hui. « Le cadre réglementaire évolue et petit à petit, le nombre de pays où les accords internationaux sur la protection des variétés, s'accroît », reconnaît François Desprez, président du Groupe Florimond Desprez. C'est cette évolution qui a poussé le semencier français à investir en Amérique du Sud, Argentine et Uruguay notamment, à renforcer ses efforts dans le bassin méditerranéen, l'Europe orientale et l'Asie centrale... Et à ne pas s'interdire de regarder vers la Chine.
(1) Unigrains est présent au capital ou partenaire d'Euralis semences, Limagrain, RAGT semences et Maïsadour.
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